Les chats noirs portent malheur, depuis toujours et partout, même dans le beau monde de Gothicat. Depuis toujours et partout, on les chasse, on les fuit, on les évite. Ici, c’est Bat Cat qui incarne cette malédiction. Une malédiction telle que sa simple présence apportait le malheur à tous ceux qu’ils croisaient. Or, Bat Cat ne portait pas volontairement le mauvais œil, il était incroyablement attristé de ce fait et chercha une solution. L’isolement était une réponse simple et adéquate mais qui le faisait terriblement souffrir.
Alors, il essaya de chercher auprès de Salem, une sagace sorcière qui traversait les nues sur son balai ou poussée par ses grandes ailes parcheminées, que son pouvoir protégeait du mauvais œil porté par le chat noir. La magicienne comprit rapidement la problématique mais elle n’avait aucun sort, aucun pouvoir qui permettait de lui ôter sa malédiction. Bat Cat baissa la tête, convaincu que jamais il ne pourrait venir à bout de son propre malheur et de celui qu’il apportait à tous.
Cependant, la sorcière avait quand même quelque chose à lui dire, un semblant d’espoir, une prophétie issue de l’arbre du Repaire. Il y avait une solution pour conjurer le sort, une seule : « Il te faudra trouver ton exact opposé, pour que la malédiction soit enfin levée. »
Alors Bat Cat se mit en quête. Il traversa le monde et les régions à la recherche de son opposé. Il traversa le temps et les années également sans jamais trouver. Mais il ne renonça pas à sa recherche tant il espérait pouvoir de nouveau entrer en relation avec quiconque sans être un danger pour eux.
Il commença par se diriger vers Gaïa, sa première idée étant que la déesse de la vie végétale, du renouveau et de la croissance pouvait être son opposée. Il n’apportait que malheur alors qu’elle amenait la vie. Mais les malheurs ne sont pas l’inverse de la vie, ils en font partie simplement. Alors il repartit pour trouver ailleurs ce qu’il cherchait si ardemment.
La seconde année, il rencontra Cristal, qu’il aborda, plein d’espoir que son scintillement soit la solution à sa noirceur. Malheureusement, cela fut en vain car les étoiles ne sont pas l’opposé de la nuit, elles en sont les amantes. Pourchassant son idéal, il repartit sans attendre.
Après cette déception, il crut un instant que Séraphin serait celui qu’il cherchait, convaincu qu’il était un démon et qu’il cherchait forcément un ange. Mais là n’était pas le cas, il n’avait rien de démoniaque, hormis son malheur. C’était la troisième année qu’il arpentait le monde mais il refusait de fatiguer, d’abandonner.
La quatrième année, il continua sa recherche, errant toujours, il rencontra Lucky Day, espérant que la chance des farfadets contrebalance son mauvais œil. Mais cela ne put fonctionner car la malchance n’est qu’une chance comme une autre, pas son opposée. Lucky Day essaya de toutes ses forces mais Bat Cat repartit, tristement.
L’année suivante, il essaya d’aller voir Cowld, convaincu que sa blancheur éblouissante ne pouvait être que l’opposé de sa noirceur. Il se rapprocha jusqu’à ce que son noir se mêle au blanc, créant un mélange grisâtre qui le donna une impression de saleté et pas du tout un soulagement. Le noir n’est pas l’opposé du blanc, il n’est qu’une nuance différente du spectre.
La sixième année, traversant une forêt touffue, il aperçut un arc-en-ciel qui lui attira l’œil. Espérant que cette avalanche de couleurs serait l’opposé de sa noirceur, il se rapprocha jusqu’à rencontrer Rio. Il fut ébloui un instant, presque ensorcelé. Malheureusement, les couleurs ne sont pas l’opposé de la noirceur, elles ne font que se fondre en elle. Ce ne fut pas sa solution et il repartit, tenace et sans autre espoir.
Dans sa quête, le désespoir le gagnant, il crut un instant que William S serait la solution, celui qui faisait naître sous ses doigts la magie de l’amour. Alors que lui ne causait que drames et désespoir. Mais seul celui qui n’a jamais aimé peut penser que ce sentiment est à l’opposé de drame et du malheur. C’était la septième année qu’il traversait le monde et sa conviction s’amenuisait de jour en jour. Il finit par vouloir s’isoler, craignant qu’il ne fasse que répandre le malheur sur le monde.
Durant l’année suivante, il entendit parler de la naissance du bébé d’Instants Précieux. Ne voyant plus que sa solitude, il espéra que son extrême contraire puisse être celle qui avait la chance d’avoir quelqu’un de si précieux dans sa vie. Il s’approcha un peu, n’osant venir à proximité de l’enfant auquel il ne voulait pas porter malheur. Il s’aperçut vite qu’il s’était encore fourvoyé et qu’elle n’était pas son opposée, simplement à un autre moment de sa vie.
Aussi, il renonça… Il n’espérait plus trouver ce qu’il cherchait. Il n’espérait plus être libérée de sa malédiction, voir disparaître la malchance qu’il apportait à tous. Il se réfugia de nouveau dans cette grotte obscure, décidant de ne jamais en sortir. Dix ans qu’il errait dans le Gothimonde à la recherche d’une personne qui pourrait le sauver de lui-même et il n’avait jamais trouvé. Il ne lui restait plus d’espoir, plus de foi. Il se rencogna dans sa noirceur et son désespoir.
Alors qu’il se dissimulait dans son refuge, un beau matin, une lumière éblouissante vint éclairer ses murs tristes. Curieux, il sortit de sa cachette pour voir ce qui luisait ainsi. Il plissa les yeux car la luminosité blessait ses prunelles habituées à l’obscurité de son habitat. Une silhouette se dessinait dans l’éclat, une silhouette qui lui ressemblait étrangement.
Il restait, muet, regardant la luminosité diminuer et les détails se préciser. Il s’agissait d’un Minousha doré, dont une lueur flamboyante jaillissait par intermittence, à l’instar du soleil. Il demeura coi, stupéfait de la grandeur et de la beauté de son vis-à-vis.
- « Que se passe-t-il ? Pourquoi me regardes-tu comme ça ? » Bat Cat était ébloui, stupéfait et surtout, il regardait le sol. Ainsi positionnés, face à face, il semblait être l’ombre noire de cet être de lumière. Parfaitement coordonnés.
- « Je m’appelle Xeirfuerl et toi ?
- Bat Cat » répondit le Minousha noir, un sourire étirant son museau.
Ça y était, il avait enfin trouvé l’astre dont il était l’ombre, son parfait opposé.