Le Gothi-monde est depuis des années un havre de paix et de bonheur dans lequel les créatures aiment jouer et explorer. Mais une partie du Gothi-monde reste réservée aux plus téméraires des créatures : les mers. Même certaines créatures marines préfèrent rester dans les profondeurs ou proche du littoral. Et pour cause ! Certaines créatures ont choisi une vie d’aventure et sont devenus… des pirates !
Naviguant sur les flots, parcourant les mers du Gothi-monde, une petite flotte de radeaux disparates formée de créatures de toutes sortes sème la discorde en volant Floryns et potions, parfois même des joyaux !
A la tête de cette flottille règne le plus terrifiant et le plus maléfique des pirates : Erythacus le Cendré. C’est un fleetitwik plein de grâce, mais ne vous y fiez pas, car c’est un redoutable adversaire. Ses plumes grises et rouges lui ont valu son surnom, et il le porte avec fierté. Il est né à Infermo, seule contrée loin des eaux. C’est là qu’il a appris la rude existence au contact des volcans crachant leur feu dangereux.
Travaillant au pied de l’un d’entre eux dès son plus jeune âge, il fut couvert et recouvert de cette poussière, cette suie, qui colora définitivement les plumes iridescentes qui parcouraient son petit corps. N’y tenant plus, un jour de grande chaleur, il s’enfuit de sa contrée. Il parcourut une longue distance, puis des embruns frais vinrent chatouiller ses plumes. Il vola à tire d’aile en direction de cette fraîcheur nouvelle et s’arrêta net en découvrant les miroitements bleutés de l’eau. Jamais il n’avait vu d’aussi belles couleurs ! Il resta immobile des heures durant, contemplant la beauté des flots. Il s’approcha et toucha l’eau de sa petite patte : elle était glacée ! Cela changeait bien d’Infermo…
Il longea la côte, admirant les langues de sable qu’attaquaient les vagues sans relâche. Le soleil avait disparu depuis plusieurs heures lorsqu’il se posa enfin. Il avait faim, et il commençait à avoir froid. Il trouva un nid abandonné et s’y réfugia pour passer la nuit.
Au petit matin, son estomac criait famine. Il regarda autour de lui et trouva quelques graines qu’il cassa sans mal grâce à son énorme bec. Tous les fleetitwiks avaient un bec fin, mais lui avait hérité d’un bec large et épais. Il était si souvent source de moqueries…
Erythacus regardait la mer, et la trouvait mystérieuse. Il avait envie de voir jusqu’où elle allait, mais elle semblait infinie. Ses ailes seules ne suffiraient jamais. Il parcourut la plage en réfléchissant, lorsqu’il trouva un tronc couché sur le sable. Il avait une taille parfaite pour lui servir de maison ! Il s’approcha et constata que quelqu’un avait commencé à le creuser.
-Bas les pattes, le volatile ! cria un petit stoufix noir et rouge en brandissant un silex pointu.
-Pardonne moi, s’excusa Erythacus, je voulais juste trouver un abri plus définitif, et ce tronc avait l’air parfait.
-Et bien il est déjà pris ! Je vais m’en faire un bateau !
-Un bateau ? Pour toi ? s’exclama le fleetitwik.
-Bien sûr ! Je rêve de pouvoir voguer sur les flots depuis des années ! J’ai trouvé ce tronc, je vais le creuser pour pouvoir m’installer dedans et je partirai à l’aventure !
-Oh… Erythacus commençait à avoir une idée, dis-moi, ce tronc est très grand, on pourrait vivre à deux dessus, non ? Et puis ça irait plus vite si on travaillait tous les deux, tu ne crois pas ?
Le Stoufix le regarda avec méfiance. Il regarda ensuite ses petites pattes tenant le silex et soupira.
-Tu as raison, en plus ce n’est pas drôle de partir seul à l’aventure. Je suis Shalk enchanté de te connaître !
Et les deux comparses se mirent à creuser le tronc. Les jours passèrent et le bateau prenait forme. Erythacus était allé chercher des feuilles en hauteur pour tisser les voiles de leur petite embarcation. Bientôt, on put mettre le navire à l’eau. Le binôme ne pouvait retenir ses cris de joie lorsqu’il se sentit flotter.
Shalk tenait la barre tandis qu’Erythacus guettait l’horizon du haut du mât. Ils parcoururent ainsi une belle distance jusqu’à voir au loin la tour d’Astisian, capitale d’Aydo’h. Ils avaient faim et soif. Ils s’approchèrent du port, mais les richesses qu’ils voyaient leur fit prendre conscience qu’ils n’étaient pas à leur place et qu’ils n’auraient jamais de quoi s’offrir un repas. Ils décidèrent donc d’attendre la nuit, et à la faveur de la lune, se glissèrent sur le pont d’un navire. Ils y trouvèrent des caisses de fruits et des tonneaux d’eau fraîche. Ils s’en emparèrent et les amenèrent sur leur bateau. Mais lorsque la dernière caisse fut chargée, un Lunaris les remarqua et donna l’alerte.
Erythacus demanda au stoufix de partir avec le navire. Il se cacha derrière une voile et alluma un feu. Il s’élança dans les airs et jouant avec le feu, il déforma son ombre. Il cria dans un énorme coquillage qui déforma sa voix, terrifiant tous les membres de l’équipage.
-Tremblez, créatures, devant la grandeur d’Erythacus !
Les créatures s’enfuirent en courant, et le petit volatile put rejoindre l’embarcation qui s’éloignait du port. Shalk riait de la farce que son ami avait jouée aux marins. Le lendemain, la rumeur courrait qu’un terrible pirate sillonnait les mers, menaçant les créatures et leur volant les vivres. Personne ne savait à quoi ressemblait exactement ce pirate, mais on savait qu’il était terrifiant, et une plume grise comme la cendre avait été retrouvée sur le bateau pillé. Erythacus le Cendré était né.
Au fil des saisons, Erythacus rencontra d’autres créatures qui voulaient partir à l’aventure. Ils construisirent d’autres bateaux, et le tout premier devint le vaisseau amiral de la flotte pirate. Lorsque les pirates avaient faim, ils utilisaient la ruse pour dérober des caisses de fruits ou de viande séchée aux bateaux marchands. Parfois, ils volaient des floryns aux créatures qui revenaient d’exploration, parfois même, ils trouvaient des joyaux.
Mais jamais ils ne faisaient de mal aux créatures. Ils se contentaient de les terrifier, créant leur propre légende. Des pirates sans violence et sans haine.
Depuis, Erythacus a sillonné le gothi-monde d’est en ouest et du nord au sud, découvrant toutes les îles que les trois mers du gothi-monde abritent, jouant avec les langues de brume de l’estuaire brumeux et déjouant les bourrasques de l’estuaire venteux. Il a vu chaque contrée de loin, s’est approché des côtes à plusieurs reprises, mais rien ne lui plaît plus que la mer. Et au loin, bien au milieu des terres, il voit parfois une fumée noire s’élever dans le ciel. Encore un volcan à Infermo, un volcan qui ne l’atteindra pas…